Thursday, April 30, 2020

Chroniques de l'invisible - 116

Cela fait un bien fou de sentir le corps textuel se transformer au rythme du vivant intégré ou en partie réanimé. La perception du monde s’en retrouve presque renversée. Le roman est là, dans l’avant tout. Je dispose des caractères hurlant leur propre effroi. Ils sont bloqués dans l’antre de la haine. Je n’ai jamais fait cela. D’abord, dans le flux continu pour que surgisse la suite telle qu’elle doit exister. Ce n’est pas que je change de méthode. Je veux aller au bout de cet outil-là, ne pas le négliger, continuer de l’accompagner de tout ce que je découvre en moi, me voyant faire le tour du domaine comme un châtelain fier de ce qu’il a réalisé. Tous les regards portés signent la différence. Je vois les vies libres et les vies empêchées ne cédant à aucune tentation, ne s’autorisant aucune aventure. Pour la première fois de ma vie, je sens ce privilège. C’est le don de tout ce que j’ai construit. C’était pour en être là et entrer dans mes passions sans aucune modération. Ce n’aurait été qu’une partie de moi et je me serais précipité dans l’angoisse. Or, ce que je veux écrire maintenant, c’est l’angoisse des autres.

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Wednesday, April 29, 2020

Chroniques de l'invisible - 115

Un nouveau roman commence. Je ne m’y attendais pas. Je ne signe pas encore pour deux ans. J’épuise d’abord. Commencer par l’épuisement. Il n’y a pas réellement d’objectif, mais tout de même, le pressentiment qu’un procédé d’écriture, à nouveau, peut amener à tout dire sans le dire. Cette fois-ci, c’est l’intrigue. Duper, faire tomber dans le piège. Les éléments que j’ai éliminés prouvent que cela ne me concerne plus directement. Ce travail, je serais heureux de le conduire. Donc, c’est dans l’ordre. Je ne fais qu’avancer. Il n’y aura pas de nuit tant que ce ne sera pas fini. Y plonger donc avec passion. Le désir est disponible. Je ne me suis même pas posé la question de tout laisser en plan. Je l’ai vu bouger sur les parois de la chapelle. Ces couleurs sont si belles. De les voir changer jour après jour m’émeut beaucoup. Je suis dans un endroit connu. J’y retourne et je reprends des éléments de la vie, comme s’il avait manqué une pièce importante au puzzle, comme si je réalisais aujourd’hui ce que j’aurais dû faire à cette période de ma vie si je m’en étais donné les moyens : l’écrire. La douleur se concentre sur la blessure, et je dois l’admettre, quelque chose m’appelle en ce lieu. Je ne lui refuse rien. Je suis prêt à mettre en œuvre tout cela. C’est le temps de cela que j’ai devant moi. Je veux le vivre intensément.

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Tuesday, April 28, 2020

Chroniques de l'invisible - 114

Quel trouble encore hier. Il fallait traverser un niveau pour atteindre le sommet. Voilà qui est fait. Même là, c’est un combat, un combat de paroles. Je refuse d’être emporté dans leur fonctionnement. Je refuse d’entrer dans la sphère de ceux qui dénoncent, de ceux qui désignent les coupables. Je dois signifier la responsabilité de celui qui a accepté de la porter, désignant et dénonçant toute la structure, tout le mode de fonctionnement. C’est fait. La responsable s’énerve. La structure est au bord d’imploser. Je lui dis ce qui lui reste à faire : fais ton travail. Chacun son rôle. J’ai été appelé à réaliser cela. C’est fait. Je n’ai que faire des conséquences à présent. Je vais pouvoir « passer à autre chose », dans mes mots, dans ma langue, dans ce que je reconnaîtrai de ce que j’étais et de ce que je suis devenu. Au fond, c’était de toujours avoir à franchir, en moi, pour être et rejoindre mon domaine. Cela ne me concerne plus, désormais. Il n’y a aucun deuil, cette fois. Les répliques de la violence dans le corps. Et l’immense fatigue pour avoir déployé une telle énergie. Je me souviens des heures passées, à relire. Pour que le filtre de la fiction fasse effet, nettoie, purifie. Toujours, se protéger de toute menace. On pourra tout me dire. C’est un roman. Le même outil pour renverser. Je contrôle mieux l’émotion qui en découle même si elle est évidemment présente. La contrôler, c’est en faire l’engrais pour continuer. Je pourrais commencer par ce que je ne sais pas. Je ne sais pas. Qui est là ce jour-là. Qui s’occupe de l’enfant. Oui, j’ai les bras croisés, par la fatigue et la consternation. « J’ai mon gardien ». Elle tente de rire de la situation. C’est un échec. Je ne ris pas. L’enfant a subi des violences. Je ne sais pas. Qui les a administrées. Alors je cherche. Je reconstitue la scène. Je tente. Impossible. Tout est au présent. Dans l’odeur des feuilles, dans l’odeur des arbres. Les mots en tête, intarissables. Une nouvelle pensée. Ce ne sont que des mots. Ils sont des titres auxquels je m’accroche, sentant la douleur circuler dans le corps, lentement, la même douleur, certainement, que l’enfant qui a subi des violences. Je vois l’homme blessé revenant de la forêt, se présentant à la fenêtre d’une cour de pierre. Il s’est battu. Il a résisté. Je ne sais pas. À qui il vient dire qu’il en est sorti vivant. La stratégie pour éviter d’affronter la réalité. Composée. Recommencer ailleurs, lancer des perches dans l’émotion, ne pas être confronté au silence de la nuit et à la fraicheur. Tout est si bon. Je reconnais ces nécessaires périodes d’attente, quelque part chez moi. Pour que les images se transposent, qu’elles trouvent le moyen de construire dans la nouvelle pensée. Ce n’est pas mystérieux. C’est réel. Je fais un choix rassemblant tout en un même lieu, puisque cela n’a pas empêché que d’autres rives se découvrent. L’angoisse de ne pas être au bon endroit, de faire semblant de faire pour éviter de faire, a disparu. J’écoute, de loin, la « maison-prison » s’effondrer. Je suis heureux de cela. C’est mon œuvre. J’aime penser que l’enfant m’entendra revenir par la parole des autres. Il assimilera tout ce qui change à la puissance de ce que je lui ai promis de faire par l’écriture. L’enquête commence. On pose des questions franches. L’enfant sait maintenant qu’il doit passer la peur de dire. Une fois passée, il n’aura plus peur, et ce sera dit. Cette fois, il le dira à la bonne personne au lieu de toujours contourner. Il verra la panique changer de camp. Il le saura aux regards, aux bruits dans les couloirs, aux conciliabules. Partout, je serai là. Il verra ce pouvoir en action. Il mettra le temps qu’il faut, mais il me retrouvera.

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Monday, April 27, 2020

Chroniques de l'invisible - 113

C’est désormais le « temps de l’autre », l’heure du débat intérieur, de la négociation. Ce que je désire réellement. Je ne veux pas que cela dépende d’une relation quelconque. Je dois avoir décidé avant, ou avoir pris une attitude face à quelque figure en qui je semble avoir projeté la responsabilité de mon avenir. Ce n’est pas ce qui se passe. Je les ai mis face à leur responsabilité. Il y a de fortes chances qu’ils activent un plan de sauvetage craignant que si aucun filtre n’est posé, l’information que je détiens ne soit divulguée au grand public. Au fond, ma décision est déjà prise puisque je la mets en œuvre. Elle est une manière de faire exister la libre expression. Cela aura des conséquences sur tous les niveaux de ma vie.

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Sunday, April 26, 2020

Chroniques de l'invisible - 112

Écrire d’hier, rapprochant les histoires, ce qui se répète en moi, sans colère. J’ai besoin de l’écrire mais il n’y a plus de colère. Je dois réaliser qu’un bout de ce récit-là est fini, le chapitre d’une nouvelle vie. Je suis plutôt pour. Sans certificat ni blabla, ma figure de l’auteur, adolescente, le roman devenu pièce à conviction, le dossier s’alourdit et mon attitude se radicalise. Cet « avant tout » qui surgit dans le combat des dictatures de l’esprit. J’entre en scène et cela révolutionne. Si tout ne change pas, au moins l’essentiel est sauvé. Parmi tout cela, la présentation sans condition de l’intransigeance, les points avec lesquels on ne discutera qu’en débat de société et non dans le système pourri de l’intérieur, avec des lois imposées, les pires, les tacites, les redoutées, les imprévisibles. Dépendre de cela n’est pas tolérable, alors tant pis, j’apporte mon éclairage. Je le sentais depuis longtemps. Je l’écrivais depuis toujours. Aujourd’hui, c’est maintenant, que je suis en présence des manœuvres arbitraires, au plus proche de ma réalité. Cela s’impose à moi. Je me dois d’en observer la puissance, de définir en son sein des objectifs et des modes d’application.

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Saturday, April 25, 2020

Chroniques de l'invisible - 111

On refait l’histoire. À cette date puissante. Renversement des procédures. Pour le meilleur et pour le pire. LOL. Je n’ai signé aucun contrat. Je n’ai qu’un guide en ce moment, la sensibilité, la rigueur, la permanence. C’est un tout composé à l’intérieur duquel se travaille la réelle stratégie.

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Friday, April 24, 2020

Chroniques de l'invisible - 110

Alors, c’est ça. Il faut continuer à nettoyer, à filtrer, toutes les paroles, pour ne pas violenter la personne qui violente. Sauf que depuis peu, je ne la protège plus, cette personne. Je veux même qu’elle périsse. Elle a suffisamment œuvré. Il est temps de passer à un autre mode de fonctionnement. « Leur » problème se manifeste toujours de la même manière. C’est trop tard. Le regret de ce qui n’a pas eu lieu les concernant les foudroie instantanément. Cette déroute me parvient, mais comme je la savais en pleine action, comme l’écriture l’a déposée en amont (il n’y a qu’à vérifier les dates), je n’ai plus rien d’autre à faire désormais que de poser mes exigences avec moi-même. Il n’y a rien d’autre en jeu. Je connais parfaitement cet effet. La vie d’avant sert toujours de test pour affronter les situations à venir. Je l’ai compris au moment où j’y signais d’un nom inconnu. La marque de l’auteur vient briser la chaîne de responsabilité et renvoie la faute à celui ou celle qui l’a commise. Je ne connais pas de plus belle révélation et de meilleure manière de faire dans la société où j’exerce actuellement, là où il m’est permis d’agir. Il n’y aura aucun mot échangé sur le fond. À cause de la question de l’intelligence que je pressens comme un sujet tabou à fleur de peau, au bord de pouvoir être entendu, et je suis dans cette dynamique-là. Le faire entendre. Pour ce faire, je dois d’abord m’entraîner à le répéter dans l’œuvre, dans la matière. Au sein de la violence réelle. Là où le langage dresse ses remparts pour protéger d’autres mots dominants.

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Thursday, April 23, 2020

Chroniques de l'invisible - 109

Nouvelle lune en taureau, ma lune de naissance. Si ce n’est pas pour dire le renouveau, je ne sais pas ce que ça peut vouloir signifier d’autre. Cela dit, je ne dois pas rester sur ces quelques remarques. Oui, il y a eu un bouleversement. Les changements ont déjà eu lieu. Ils étaient préparés. Je n’ai plus qu’à les observer, au sein même du désaccord qui persiste en permanence dès que je rencontre en l’autre une manière trop vive de conclure. C’est là que je passe (je dirais, dès le premier jour) à une modalité plus conquérante. C’est vraiment que cela se joue. Je n’ai que faire des conséquences. Je pense aux expériences inaugurales, à ce qui fait qu’un jour cela se déplace réellement. La puissance en action n’attend pas. Elle doit vivre immédiatement. Je pense aussi que la durée ne m’effraie pas parce que je l’ai déjà éprouvée, travaillée, dans des circonstances qui n’avaient rien à voir avec le monde en présence à ce moment-là. Cela paraissait étrange. J’avais tout de même réussi à le faire. C’était pour se préparer à maintenant, pour se confronter à l’énigme, si forte, qu’elle empêche les heures de défiler. C’est toujours la même heure, le même miroir qui reflète, et si je ne mets pas en action, tout s’effondre. Il y a trop de protections encore. Je vais les faire sauter. Une à une.

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Wednesday, April 22, 2020

Chroniques de l'invisible - 108

Le point fondamental sur lequel je suis disposé à ne plus être d’accord avec des formes d’autorité aujourd’hui déjà réglées concernant cette manière de se rendre indispensable pour valoriser son action est sans doute de maintenir mouvant le terrain de l’expérimentation permanente ne figeant pour le moment ni aucun lieu définitivement ou temporairement, ni aucun lien avec l’obligation morale qu’on aurait d’assumer les conséquences de nos effractions à l’intérieur même du réel, là où survit une telle énergie que je comprends que certains aient peur de l’affronter pensant tout naturellement qu’ils auraient découvert un trésor alors que c’est une des expressions de la vie dans ce qu’elle a de plus incompréhensible sans être pour autant inaccessible. Je dois avant tout considérer que si je reviens d’un combat blessé (et je le suis puisque la douleur survient), l’urgence est de suivre l’injonction du langage qui, je n’ai de cela aucun doute, s’adresse à moi si je suis le seul à avoir vu, lu ou entendu ces mots. Retour au fait réel, à l’autre fait réel, à l’autre effet du réel, celui-ci que je travaille dès lors que l’écriture se met à l’œuvre dans l’aspect le plus concret de son élaboration. J’aime l’idée d’être dans la même disposition qu’un autre, que je sois moi aussi confronté à la perte de tout car c’est lorsqu’il est possible de tout perdre que cela peut créer. Il y a un tel débat intérieur que je dois laisser l’espace de la création disponible. Conclure trop rapidement serait supposer en amont ce que cela pourrait modifier à l’intérieur du langage. Or, s’il est un lieu où l’on ne peut pas se hâter, c’est le langage. Il est comme la terre, comme les arbres, composé lentement, modifier lentement. Je ne suis pas à son service. Je suis celui qui naissant à nouveau déplace comme chacun parce qu’il occupe un espace. Et il est vrai que peu à peu je sens la manière de faire se métamorphoser. Je n’ai que faire de répéter, que des mots reviennent, des ponctuations reviennent. De même, je perçois que la peur d’une incohérence a totalement disparu. C’est nouveau. Peut-être depuis la phrase qui le dit. Je suis confronté à quelque chose de l’ordre de l’intuition, qui est plus fort encore, pas au sens de supérieur, au sens où il est peut-être un terme trop difficile à traduire, dans une autre langue. On dirait platement ésotérique, mais pareillement, c’est plus fort, au-delà de cela, comme une présence absorbant mes pensées, qui m’accompagne, c’est vrai, mais que j’accompagne aussi. Ce n’est pas une entraide. Nous sommes sur un même chemin.

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Tuesday, April 21, 2020

Chroniques de l'invisible - 107

Je change de présentation, change de personnage. C’est peut-être le dernier jour. Je n’en sais rien. Il y a eu des tourments. Je les écoute. Des contradictions. Je les écoute. Tout cela dit la fragilité de l’état de l’être. Un trouble puissant. Je n’attache de conclusions qu’au fait réel. Ce que je suppose n’a lieu que dans mon esprit. Ce sont des doutes peut-être. La manière avec laquelle je me prépare est radicalement différente. J’entre dans le vif du sujet et je viens le « subir ». C’est un bombardement. Je suis suffisamment armé pour le recevoir. Cela ne s’arrête pas. Ou cela ne s’arrêtera que parce qu’il y a la fin du jour. L’admirable secret désiré ne tient pas. L’objectif ne tient pas mais j’ai vu le mot « soigner ». Celui-ci s’est écrit dans la puissance d’un geste, comme « le fleuve est mort sous la belle étoile ». Je ne veux pas confondre les lieux d’écriture mais l’emprunte est trop forte pour ne pas prétendre au statut de l’œuvre. Il manquait peut-être cet élément de circulation. Je l’ai tenté à plusieurs endroits et ma capacité d’observation m’a permis cela, que cela existe au moment le plus juste. Dès lors, ce n’est plus la foi qui est en jeu. C’est une forme de certitude, ou plutôt une approche de cela car je sais qu’il n’y a qu’une seule certitude. « S’approcher de » pour traverser ce qu’est la pensée permanente de l’arrachement et de la disparition, quand il n’y a plus rien, plus personne, et que tout rate constamment, la spirale d’une violence auto-administrée, quand l’écriture tremblante n’a plus que des traits à jeter sur le papier. Oui, il faut beaucoup d’amour.

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Monday, April 20, 2020

Chroniques de l'invisible - 106

Il est vrai que cela peut être considéré comme un piège surtout si l’objectif non avoué est de maintenir la situation et de toujours être à la bonne place, celle du plaignant, victime d’une injustice. Assumer la responsabilité de son action devient alors l’impasse, quand un des nœuds n’est traité à aucun niveau. Fermeture de la porte à ce stade. C’est trop tôt ou trop difficile ou l’outil intellectuel n’est plus opérant. Il a été altéré par des situations répétitives, des combats détournés. Toute la colère s’oriente sur les mauvaises personnes. Le responsable, protégé par le système, continue d’agir même s’il est absent, voire encore plus fortement s’il est absent. Ainsi, continuer dans la pensée à alimenter la conversation nécessaire. Ce ne peut pas être anodin. Puisque la rencontre a eu lieu. C’est fait. Ce sont ces circonstances, dans cet interstice, qu’il faut prendre en compte, et uniquement celles-ci le temps qu’elles s’établissent dans la temporalité d’une situation en train d’être réglée. C’est elle qui aura un impact. Il n’y aura pas de signe discordant. Ce que je crains n’aura pas lieu. C’est ce que j’aurais désiré il y a seulement quelques jours, mais ça n’aura pas lieu. C’est l’aspect le plus fantastique de cette affaire, de cette histoire qui, au fil de la pensée, déroule des scénarios bourrés d’énigmes, des questions pièges à tous les étages. Piège parce qu’il y a toujours cette invraisemblable option d’une bifurcation dans le déroulé. Les tentations arrivent sans prévenir. Ma force de caractère est alors mise à l’épreuve. Par période. J’ai pensé aujourd’hui : ce n’est pas la bonne période. Je ne vais pas passer ma fin de lune à cela. Et je ne veux pas savoir ce qui se passerait si je cédais à ces tentations de l’esprit. Je sais que je suis opposé à cette manière de vivre et que je dois lutter pour des convictions qui elles s’inscrivent sans heurter quoi que ce soit. L’aventure que je désire est dans le corps du texte entièrement contenue. Je sais que cette étape est difficile à passer, comme toutes les étapes d’ailleurs. J’ai déjà écrit l’histoire de ce genre de rencontres qui ne mènent à rien d’autre qu’au gouffre renouvelé de la dépendance. Je ne rêve pas d’autonomie globale, j’aime l’interaction. J’aime le lien social. Je le réclame à la hauteur de mon désir et je dois, sans congédier personne, éviter toute forme de corruption de cet idéal, même si je ne le formule qu’à moi-même. Après, c’est l’objectif qui agit, le point que je veux atteindre, dans la tonalité abjecte du pouvoir actuel, « quoi qu’il en coût ». La première chose que je provoque concerne la continuité. Il faudra une suite. Je l’imagine ensuite dans les difficultés présentes, dans ce calendrier du réel qui ne correspond pas aux besoins de l’humanité. Car je suis dans la même situation. C’est peut-être la dernière fois. Il ne faudra rien rater.

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Sunday, April 19, 2020

Chroniques de l'invisible - 105

Et c’est en effet ce qui se passe. Je n’écris plus à rebours. C’est le devant qui se dessine, l’endroit même où l’intelligence prend corps comme elle prend forme, l’idée qu’il s’agit de mettre en réseau des méthodes d’observation du vivant, prouver comment il fonctionne, comment il s’expérimente dans la chair. Ce n’est pas monstrueux d’y être si la manœuvre est finement conduite, pour procéder par étape sachant qu’il n’y aura peut-être qu’une seule fois. Le suivi de cela n’est pas une condition en soi et c’est parce que ce n’est pas une condition que l’effet prend cette ampleur, dès que ce qui sert la haine ou nourrit la colère au quotidien tombe pour laisser la place béante de l’émotion. Cela n’est jamais traité. C’est l’abcès que je perce, sans peur, en confiance.

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Saturday, April 18, 2020

Chroniques de l'invisible - 104

Le pire serait de ne pas avoir envie de découvrir la part magique de l’autre. Ce serait là que des formes passionnelles s’arrêteraient. Comme ça. Pour cette raison. L’étincelle qui s’illumine avec si peu de moyens. Lorsqu’on ne le fait pas, et lorsqu’on fait en sorte que tout se terre dans le non-dit, on maltraite. Des milliards d’idées surviennent qui toutes pourraient résoudre. Mais à nouveau : que le livre. Le même mot. « L’essentiel instant qui étincelle ». Admirable rencontre. Cela s’est fabriqué depuis « les mystères sont des monstres patients », tout ce qui m’a conduit à découvrir qu’on pouvait vivre libre dans un état de pureté grâce aux mots que l’on inscrit sur une page, au fil des pages. Je n’ai pas peur de répéter encore ce que cela provoque, ce bouleversement, de se sentir à toujours accompagné. C’est certainement grâce à cela que les événements du quotidien, les autres, n’arrivent pas à prendre de la place, comme s’ils ne le méritaient pas. Ils ne sont pas à la hauteur, dans la pensée, pas au niveau qu’il faut pour exister. Eux aussi bouleversent également (je ne suis pas insensible au vivant permanent), mais ils bouleversent parce que je viens d’écrire ceci, de lire cela. Leur sensibilité est rendue possible et je ne saurai jamais si j’aurais été différent sans ces mots dits ou ces mots lus (ce sont parfois tellement souvent les mêmes), je sais que la vie est telle que je la ressens parce que j’ai choisi de la ressentir à travers cela, pour vivre à l’intérieur des mots, incarner le mystère qui circule sans commencer par « il faisait beau ce matin-là ». D’ailleurs, il pleuvait. Le passé, on peut toujours admirablement le raconter, les lumières, les parfums, la rumeur qui gronde, les angoisses partout dans le corps, y compris dans celui qui se croit le plus fort, angoisses de ne jamais savoir comment faire lorsque s’adresse la simplicité d’un sourire, lorsque l’énergie s’infiltre dans les failles pour faire s’effondrer l’édifice, voler au temps les minutes essentielles. Moi, je suis là. Je n’ai pas d’horaire à respecter dans ces moments-là. Il n’y a qu’un devoir, celui d’être présent, dans l’écriture de ce qui arrive vraiment, regardant fuir les regards devant l’insaisissable. J’adore me dire qu’il s’est suffisamment passé de micro-réalités que le lendemain prévisible puisse être entièrement transformé dès maintenant, dès le désir qui s’installe dans les fissures. Merveilleuse harmonie.

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Friday, April 17, 2020

Chroniques de l'invisible - 103

Ce que j’aurais fait si. Cela se pose. Ce n’est pas vraiment un deuil. Pas pour tout. Je sais que c’est mystérieux. Il m’a fallu abandonner des voies, dès le début, pour ne pas être tenté à nouveau, ne voir cela revenir qu’en pensées. C’est trop éphémère pour le mettre en fiction, et pourtant, c’est présent. Alors, je tente une nouvelle immersion. Oui, nouvelle. À partir du ressenti, retrouver de quoi il s’agit lorsque les mots se mêlent et qu’ils suspendent tout à une autre compréhension. Le secret, s’il y en a un, est dans le livre, dans cette admirable coordination du vivant. Y retourner toujours, c’est toujours emprunter. Je mesure à quel point il est bon mais déroutant de laisser agir les sensations toutes en lien direct avec ce que je découvre de ce que je suis au jour le jour, au fil du jour, les heures hurlantes, les peines indicibles, les manques cruels, les ratés, tout ce qui était prévu de se construire dans la durée tout à coup évaporé. Cela n’aura pas lieu. Définitivement. Entre les êtres, disparus, que je ne reverrai plus. Je m’en rendrai compte dans quelques mois seulement, après une période aisément admissible, et ce sera trop tard. Cette pensée est si présente que je veux qu’elle s’inscrive, qu’elle soit datée, mieux que de l’avoir dite, sentir comment elle est en travail. C’est peut-être la conséquence d’une fonction mal placée. Moi et mes fonctions. À toujours croire que je suis en bonne place. Il est vrai que c’est plaisant. Le rendez-vous est sans doute plus déroutant, une mise en danger, une nouvelle expérience. J’ai bien quelques outils en cours d’expérimentation, une mise en œuvre, avec les mots qui s’associent, comme une mise aux normes. Cela me parle. Cela me répond. Il y a quelque chose d’extrêmement précieux que je ne veux pas brusquer. Un enseignement. Apprendre à dire ce que cela contient. Je n’aurai en mémoire que les mots que j’ai tracés. Ce serait trop et prétentieux de ma part de vouloir tout savoir. J’ai voulu. À cause de la manière qu’ont les personnes de mon entourage d’affirmer qu’ils savent. J’ai pour moi d’être resté à l’écoute, proche du sujet, avec les insomnies qui se déplacent dans la journée, comme une éternelle première leçon. Il y a, à la base, des sensibilités qui se rencontrent. C’est ailleurs que le regard, ailleurs que le touché, ailleurs que la parole, ce qui s’illumine par la floraison et ce qui naît de cela, à travers quoi je vois tout ce qui se relie. La nécessité de la violence, par exemple. Il a fallu se battre et il faudra encore, car ce ne sont que des mises sous tension d’idéaux contradictoires. Il n’y a pas celui qui a raison. Il y a celui qui y parvient. C’est un domaine tout entier, la puissance d’un collectif. La puissance, également, d’un point de vue agissant comme un point d’ancrage. Je ne l’avais encore jamais vu sous cet angle, nous, vivant de la cave au grenier, ou de l’autre côté, au temps de l’esprit qui se souvient. Il faut incessamment rappeler, créer des divinités pour porter le message, et ce qui l’impose, c’est la richesse d’un seul instant vécu entièrement. On ne saura jamais rien de ce temps-là. On ne saura rien des tentatives, des trahisons, des accords tacites. On dira le fait tel qu’il est. Voilà la situation, à rebours, nous échelonnerons. C’est le savoir qui domine actuellement, qui verse et déverse. Je n’ai jamais été aussi proche de cette plénitude. Il a fallu que je mette en œuvre des sensations anciennes, là où j’avais tout laissé pensant me tromper encore, mais je ne me trompais pas. Il y avait cela en moi qui n’appartenait à rien du monde qui gouvernait alors. J’avais senti qu’il faudrait un détour. Appelons ça le mystère de la vie.

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Thursday, April 16, 2020

Chroniques de l'invisible - 102

Forcément, je suis déçu. Pas de grottes, pas de caves, pas de sévices corporels. Pas de répression. Que des phrases qui tombent du ciel. Il a peut-être manqué un merci ou deux. Après, je n’étais pas obligé de forcer ce qui aurait été différent. Bon, ben je l’ai fait. Une façon comme une autre d’avoir bonne conscience et de garder de bonnes relations avec des personnes que j’apprécie. Alors, reprendre où j’en étais hier, où j’en étais de l’échec absolu. Je me suis dit qu’il fallait l’écrire, assumer que cela ne soit pas jeté comme je l’ai si souvent fait. Un seul lieu pour tout travailler. Il n’y a pas de honte à avoir. Cela va juste trop vite parfois. J’ai cette impatience en moi. Capable des plus grandes lenteurs pour des formes travaillées et tout à coup, la chose bâclée, vite, comme pour oublier que ça aussi ça existe dans ma vie. Comme pour dire au suivant. Après, ma conviction est ébranlée, ma foi aussi. Je regrette. Je suis seul avec ces regrets. L’après a cette forme immonde. Je voudrais qu’elle n’existe pas. Qu’il en soit autrement pour le monde entier. Mais il y a cela. J’apprends à m’infliger la pénitence. Voilà.

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Wednesday, April 15, 2020

Chroniques de l'invisible - 101

Le dire simplement. Le faire simplement. Dans l’idéal de la pensée, j’ai rêvé. Cela commence par la manière avec laquelle je suis accueilli. On pourrait dire « comme des prêtres ». En tout cas, la tenue est la même pour tous. Arrivé, dévêtu, rhabillé. La seule distinction est la couleur. La couleur de l’aube, blanche, orangée, bleue, violette. C’est la condition pour être admis à discourir, admis à partager cet espace, quand il n’y aura plus que lui et moi, le désiré et le désirant, tentant l’extase à nouveau à travers ce qu’il y a de plus beau dans cet état de l’être. Il s’agit donc de se confier. Cela m’arrive en ce moment. C’est cela qui arrive. C’est ce souvenir tenace. La première fois, si claire. Les autres comme chaque nuit, comme chaque fois. La machine emportée jusqu’à ne plus pouvoir s’arrêter. Je ne sais même pas si c’était bien ou mal, si nous aurions dû nous abstenir. Le souvenir est plaisant. Je m’interdisais de le convoquer mais je défie quiconque de pouvoir le juger à présent. Je peux vivre le trouble entièrement, des jours durant. Rien ni personne pour le réduire au silence. Toutes ces fois où je faisais bonne figure. Il faut sortir, il faut rencontrer. Comme il faut tenir. Personne, donc, ne le verra. J’aurai tout voilé. Et maintenant, le dévoilement. Je n’ai jamais rien lu à ce sujet. Ce que je cherche est à créer.

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Tuesday, April 14, 2020

Chroniques de l'invisible - 100

Mains tremblantes. Ce qui m’a sans doute échappé, remis en question. Je dois écouter les sensations, ne pas céder à quelque facilité. Ce serait si simple de passer cette épreuve « comme avant ». La culture qui s’opère dans le corps du texte est d’une autre nature. Je pourrais considérer que ce n’est pas important. En quelque sorte, faire semblant, mais je prends tout cela fort au sérieux. Oui, je veux m’y consacrer et pour que cela vienne à moi, je dois accepter des logiques cycliques durant lesquelles on peut apparaître et disparaître, ne pas être en mesure d’être sur le terrain, physiquement. Ce que j’élabore avec ces données pourrait être mystérieux. Voyons ce que cela serait ou ce que cela a été. J’apprécie beaucoup certaines odeurs grâce auxquelles j’interroge où se situe la maturation. Si c’est là l’énergie créatrice, ou en tout cas une partie de cette énergie que je ne prenais pas en compte, je suis prêt à le vivre dans son intensité. Écrire comme cela modifie le mouvement respiratoire. Je peux m’offrir ces jours-test, ne faire qu’être avec cela une bonne partie du temps. Je n’ai aucun doute qu’au début d’une période où l’égo peut magistralement s’exprimer ne surgissent que des outils sans contenu que l’être consommant a du mal à maintenir en place tout en se croyant indispensable. Le serions-nous véritablement que nous aurions été rappelés en renfort. Tout ce que cela pourrait traduire dans les faits est mon impossible retour, le fait qu’après convalescence et rééducation, des formes autoritaires de ce genre soient me concernant inenvisageables, voire concrètement intolérables. C’est concret, cela tombe vraiment, je le sens dans la souplesse de tous mes gestes et de toutes mes réflexions. Aussi, appliquant à la lettre ce que de découvre, je sais que je dois, avant de revenir au front m’être doté d’une armure que personne ne pourra briser. Cela commence dans l’imaginaire. C’est là que tout fut créé par besoin vital. Ce n’était donc pas un hasard et j’entends les signes concordants. Le savoir dès la naissance est si puissant. Et me rendre compte que le niveau sera toujours réactivé l’est tout autant. Si je lis à la lettre, je dois fabriquer dans l’esprit ce qui permettra une action sereine. Il n’y a rien de prédéterminé à part la capacité de l’esprit. C’est à cela que je n’ai pas cédé, à cette foi inébranlable. J’ai bien conscience du paradoxe que cela soulève et je n’ai pas honte à l’intérieur du palais d’interroger les fondamentaux, de les remettre en jeu. Gagner du terrain par la voie de la consolation suffira. On ne soupçonne pas ce qui s’acquiert dans ces pratiques libérées. Cela se passera en dehors de l’écriture, à travers l’écriture, pour l’écriture. Les pistes seront si nombreuses qu’il n’y aura plus qu’à piocher dans le vivant de l’être. J’aime ces dictionnaires et ces listes de vocabulaire qui s’établissent au fur et à mesure. J’aime que le présent soit si présent. Il fallait un contour pour le visualiser. Je plonge dans tout cela sans aucune crainte.

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Monday, April 13, 2020

Chroniques de l'invisible - 099

Ces personnes qui ont cette chance de ne pas être nées dans le milieu où je suis né et moi, à mon tour, d’être né là, sans autre ailleurs, sans autre référence. C’est une chance telle que je n’envie à personne la question d’une meilleure place qu’on aurait à occuper et n’ai plus vraiment ce désir d’être compris lorsque la « mémoire d’anciennes vies » s’exprime. J’évalue tout de même ce qui pourrait certifier cette part qui va au-delà du spirituel, au-delà de la foi et de formes de convictions. Ce n’est pas un hasard que se connectent les merveilleuses fenêtres de la pensée lorsque tombent les masques du superflu. Ainsi, se retrouver en face à face avec l’énigme, ce qui même constitue l’intrigue, ou bien on le comprend parfaitement et on l’ignore, ou bien on ne le comprend pas et on se dit que c’est l’erreur de jugement. C’est une des dimensions de l’esprit que d’être en combat permanent, une de ces facultés d’en venir à bout. Ce que cela contient, je l’apprends jour après jour, sans dictée, en me laissant conduire dans le ressenti. Ce qui rompt à cet instant précis, c’est la fin, c’est le désir d’en finir et c’est ce que j’ai puissamment réalisé en l’espace de quelques semaines, ouvrant un champ d’exploration si vaste que rien n’est en mesure ni de m’atteindre ni de m’arrêter. Je pense souvent à ce qui empêchait, au fait que la question se soit posée à maintes reprises. Aujourd’hui, plus rien. Je savoure des domaines où je ne suis ni dieu ni maître mais le garant d’un équilibre en action dans le vivant de l’être.

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Sunday, April 12, 2020

Chroniques de l'invisible - 098

Date-clé encore dans le développement personnel. Ou période charnière. L’aspect suspendu du matériau se ressent à tous les niveaux. La drôle d’impression que c’est aujourd’hui que quelque chose se joue. Je laisse faire cette négociation. C’est une affaire d’esprit. Il y a des heures où il est possible de mettre en mouvement nos troupes, d’autres où il ne sert à rien de combattre. Je le sens au déroulé d’une journée. Parce qu’il s’agit d’être au sujet, de le cerner, de ne lui donner aucune issue. Il sera traité. La transformation que j’ai opérée a sa part d’efficacité dans ce qui se passe. Ce sont des années de travail. Ce qui pulse à l’intérieur se mesure. On ne peut m’identifier.

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Saturday, April 11, 2020

Claro

Je comprends, bien sûr, cette évidence – rechercher, ébaucher : ce sont là les deux temps de l'écriture. Ce que l'on ne connaît pas relève de la fiction. Ceux que l'on ne connaît pas aspirent à la fiction, ou du moins en réclament en sourdine les avantages.

Mais il ne suffit pas de se retourner pour voir ce qui est derrière soi, non, ce serait trop facile, et je suppose qu'un jour arrive où l'on doit apprendre à défroisser sa propre vie, à en lisser les plis, car c'est n'en doutons pas dans ses tracés confus qu'est inscrit, souvent illisible, non pas le faux mystère de soi, mais le souvenir perdu de tant de gestes, là que se sont agrégés les signes de l'impossible transmission.

Chroniques de l'invisible - 097

Avoir immédiatement relégué la question du genre m’aide à formuler des principes conquérants. J’ai conscience que je suis sur le terrain du vivant et que de là découlent des orientations si multiples que celles et ceux qui n’ont qu’une voix pour dire, transmettre, traduire, sont totalement décontenancées. Je ne suis pas surpris de constater que les seules personnes qui me refusent l’accès sont celles qui ne comprennent pas et n’acceptent pas les changements que j’ai si profondément altérés que leur manière n’a plus d’impact même si je ne suis pas physiquement présent. M’exclure n’a aucun intérêt mais c’est sans doute trop tôt pour que ces personnes le réalisent. Au fond, toute l’expérience que j’apporte, contenue dans ma manière d’être, globale, ma manière de regarder, de répondre, de ne pas participer à l’alliance tacite qui m’obligerait, par exemple, à ne pas juger, tout cela me dispose dans une autre temporalité. Je suis dans un autre monde, si protégé que je n’ai peur de rien concernant de faibles attaques, les coups bas, les formes quelque peu humiliantes qu’on tente tant que personne n’en interdit l’accès. Ce sont deux « sans limites » qui se confrontent, car moi aussi je suis sans limite, mais j’agis parce que celui-ci est soit réglé, soit géré ailleurs, sur des notions fondatrices.

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Friday, April 10, 2020

Chroniques de l'invisible - 096

Les domaines s’unissent en même jour. Cela arrive très certainement plus souvent, mais là, je le remarque particulièrement. L’écriture du présent génère cela sans mesure. Les conséquences sont exceptionnelles. Sur ce que je ressens d’abord. Sur l’écriture ensuite. Les deux liées comme toujours. Avec, accompagnant, la lecture en parfait accord. De mémoire : « La maison sert à attendre quelqu’un ». Je retrouverai la citation. Je l’ai perdue très certainement parce que s’impose à moi le fait qu’une mémoire gouverne, à laquelle je fais confiance. Elle est plus importante que certains faits réels. Je me souvenir de ce qui fait obstruction.

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Thursday, April 9, 2020

Chroniques de l'invisible - 095

Dès aujourd’hui, changement de stratégie dans une série où elles sont si nombreuses qu’elles vont dépendre de la manière avec laquelle j’écoute le présent. Ce lieu où tous les conflits pourraient se résoudre par la parole. Des milliers de solutions. Quand je dois déplacer même dans l’urgence. À la vitesse de l’éclair, maintenant que je sais mieux à qui je m’adresse. On se souviendra de tous ces épisodes, de tout ce que j’observe, miroir tendu vers le réel, pour mettre fin à une forme de fascisme et si je le peux, une forme de torture.

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Wednesday, April 8, 2020

Chroniques de l'invisible - 094

Puisque j’ai osé, il faudra le refaire, en visant plus précisément. Le plus difficile est de pouvoir intervenir après la sanction, justement lorsque le délaissé en a le plus besoin, lorsqu’il ronge son sentiment d’injustice, lié au fait que tout se passait très bien et, parce que ça se passait très bien, il prend cher à cet endroit, il ne sait pas que la sanction ne le concerne pas directement, qu’il suffit d’une petite ruse pour qu’elle s’adoucisse puisqu’il a en face de lui des formes contradictoires, trop autoritaires, ne répondant à son désir que par l’humiliation publique. Je suis convaincu que ces deux jours seront significatifs. Une fenêtre s’ouvre. J’y serai résolument actif car s’il y a une action à entreprendre, c’est dans le nœud, sur le terrain, au contact de tout ce qui s’enchaîne sous mes yeux. Ce qui arrive, donc, gérant dans un premier temps ce qui me concerne personnellement, c’est le retour d’une intensité extraordinaire. L’invraisemblable, très probablement. Ce n’est pas rien d’être allé se fourrer dans le nœud du problème. Pleine lune transitant de balance à scorpion.

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Tuesday, April 7, 2020

Chroniques de l'invisible - 093

Alors, c’est vrai. Cette période-là se répare. Retour dans la cour de l’école. Tout ce qui s’y est passé s’y trouve et je relie des aventures entre elles. Elles ont lieu dans le corps, ensemble, et sans hasard, l’être délaissé vient dire, signifier. La carapace ne tient pas très longtemps. Pour arriver à cela, il a juste suffi d’écouter. Je ne suis pas dupe. Je sais de quoi ça parle. Avant que j’intervienne, je dois évaluer d’abord, où sont les bornes, que sont les signes. C’est presque la partie la plus facile. Il suffit de laisser faire, d’entendre les contradictions, les modes banals de séduction, puisque ce qui unit des êtres, simplement, quel que soit l’âge, n’a que cette fonction séductrice, surtout lorsque les êtres en question supposés être les caïds du quartier, ont une part féminine à constamment contenir et qui cherche la première faille pour se déverser. L’anormalité formulée n’est pas au bon endroit. Elle y est en partie à cause de, mais comme la cause principale n’est pas étudiée, on passe à travers les filets. C’est donc perdu d’avance, tant qu’il n’a pas été pensé en amont comment les personnes concernées doivent apprendre à communiquer, comment les personnes non concernées n’ont pas à être mêlées à l’histoire. Il peut y avoir des accidents, des circonstances exceptionnelles. Ça ne peut pas être tout le temps ou quasi tout le temps. J’ai senti le moment où je n’arriverais pas à contrer cette diversité. Il m’a fallu un regain de confiance pour me savoir au bon endroit, à la bonne place. Et, à partir du moment où le deuil de ce que je ne sauverai pas est assimilé, je peux intervenir très justement et voir à quel point certains regards espions tenteront leur aventure, sauf que ceux qui se trompent de méthode seront bientôt en échec. L’essentiel vient de leur échapper. Je n’ai pas besoin d’autre chose. Tout se justifie. C’est l’œuvre du temps ou le temps de l’œuvre. Ou les deux ensemble. J’aime quand ces mots reviennent.

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Monday, April 6, 2020

Chroniques de l'invisible - 092

Je doute maintenant que ce soit le bon jour. Pourtant, je n’ai rien touché aux dates. Il y a eu un effet de l’écriture. Cette autonomie à laquelle je la laisse accéder prend une ampleur considérable. Ce n’est pas tout à fait aussi immédiat que ce que j’aurais pensé spontanément, mais au moment où l’événement surgit, il n’y a plus rien d’autre. La routine à laquelle j’avais accepté de me soumettre à cause d’un fait réel a été désintégrée. J’ai donc contré cette réalité. Je l’ai pensé en amont.

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Sunday, April 5, 2020

Chroniques de l'invisible - 091

Et tout circule, en effet, à la vitesse de chacun. Les faits marquants sont tous à différents degrés essentiels. À ne pas manquer, par exemple. Remettre à l’ordre du jour le rapport au danger, l’expliciter avant de l’expliquer. Il faut du temps pour calmer la douleur, passer par des étapes. La seule personne qui connaît le moyen d’y arriver est celle qui a souffert. Bien sûr, il y a des blocages, mais les blocages sont hors-sujet, sujet de l’autre harcelant, de tous les autres harcelant alors que le corps a besoin d’un soin individualisé. Sinon, il ne fait que maintenir en place les processus de soumission et de dépendance. Il faut du temps, donc. Je connais cela par cœur. Et ils n’ont pas de temps. Ça aussi, je le savais, mais dans un milieu carcéral, cela devient vital.

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Fragment de jours - 15

Le réel venu tout bouleverser, ne lâchant pas sa proie. Tout accélère et ramène au même point. De simples questions posées. Une prise de risque maximale. Je refuse encore. Ce n’est pas la bonne décision. Et les figures vacillent. Elles hurlent dans la tête. Elles voudraient prendre place, être au centre, se contenter de détruire, oui, tout dévaster. Cela n’a aucune importance depuis que les conquêtes se multiplient. Aucun conseil à aucun moment. Démerde-toi avec ces paradoxales entités, ces journées entières. Je ne me laisserai pas prendre au piège. Je mentirai sur tout. L’espace que j’occupe n’aura aucune pollution. Dès demain. Application stricte. Je ne suis pas surpris qu’à deux doigts d’aboutir, les forces adverses se déchaînent. À ce stade, l’intrigue propulse l’inquiétude. Le héros ne sera peut-être pas sauvé. Plus de suite possible. On a tout oublié. Les membres tremblent. Alors, je reprends en main les rênes. J’ai en moi ce que je n’ai révélé à personne. La même stratégie à laquelle se sont ajoutées des années d’expérience durant lesquelles je n’ai cédé sur aucun compromis. Maintenant, j’entends lorsque la voix se dérègle, en quelque sorte plus nasale, pour tout le temps que je passe à l’observer, je recompose à partir de cet opportunisme. La méthode n’est pas là pour m’enseigner et j’ai peu de considération pour toutes ces soi-disant occasions manquées. L’idée m’était venue pour justement me détourner de cette tentation. Il n’y avait que cette option pour, selon moi, assurer aux autres modes de communication une visibilité presque parfaite. Le tout était de se placer, entièrement, à la minute présente, sans haine, sans perspective particulière, ce qui avait donc commencé alors, sans détermination. C’était l’option de l’immédiat qui m’avait révélé. De cela, je ne pourrais jamais parlé à cause de l’impossible à dire quand une nuit je me sens seulement et simplement porté. Je ne sais si je m’attendais réellement à cette déception. Encore une histoire qui a mal tourné. Drôle de compte à rebours qui s’enclenche. Et cette violence sur le corps. C’est la nuit. Ça fait mal. Le truc qu’on écrase. C’est vivant. Ça plaît parce que c’est vivant. Un truc inerte aurait été mortellement ennuyeux. Je vois tout cela beaucoup mieux. Je le comprends beaucoup mieux. Conter en dehors de cela. Rien. Subitement rien. Les relations sont toutes gouvernées. Je serais impoli de ne pas les prendre en considération au même niveau. C’est pourtant ce que je vais faire. Quand on ne sait plus à quelles branches il est possible de se raccrocher. Tout ce temps perdu. Je dois faire avec ces éléments de rupture. Du jamais lu. Aucun fait divers. Pas de justification. Et je n’ai rien ficelé. On me croyait ailleurs. Je n’avais pourtant fait qu’appliquer. Presque six mois de vie, réunis, les êtres disparus qui ne manquent plus. Je traite leur évocation lorsque le souvenir que j’en ai se manifeste. Voici enfin la nouvelle étape. Je l’ai commandée. Je l’ai provoquée. Le véritable gouffre. Plus de faux semblants. Je suis arrivé à un stade que j’avais envisagé. Il serait douloureux. Je tente d’y faire face avec toutes les polyphonies imaginables. La fiction s’y travaille quotidiennement. Ce n’est peut-être pas le bon jour. Un jour sans. La chose interdite. Dont je profite maintenant. Il y a eu trop d’années consacrées à l’ultime combat. Je n’en prendrais conscience qu’en ces lignes. Ce monde qui s’est doucement stabilisé. Je l’avais désiré. Je ne voulais plus espérer d’autre avenir que mon actualité se poursuivant. Ce serait donc ce jour où je me suis posé, lorsque je regarde quelques mois en amont, je retrouve tout, la cohérence de mon sujet, la beauté de mes personnages. Nous étions-nous pensés autrement ? Je ne crois pas. Dès le dernier point, je passerai à autre chose. Je me moque de tout, du niveau attendu, des remarques déplacées qui ne concernent pas ce que je suis en train de réaliser. Je sais qu’il n’y aura de cela aucune méthode et que le chemin sera long. D’où ce ton de prologue que j’adopte. Je n’en suis qu’au début. La plupart des sujets abordés devaient l’être pour nettoyer. Je devais me considérer dans un tout autre domaine. Pensées autour de moi dispersées de tous les inachevés. Cela ne résoudra rien de se presser, ni de bousculer les foules, ces masses sourdes dont je ne distingue plus que l’absolue nécessité d’être devant l’autre, ou au-dessus, prête à piétiner. C’est une question que je pourrais poser au début d’un chapitre. Où serai-je à la fin ? Comme je pourrais me poser la question a posteriori. Où étais-je ? C’est presque une constance. Un retour au réel. Une nécessité de l’être qui s’est échappé. Qui a besoin de revenir. C’était un long voyage. Oui, durant tout ce temps je n’ai pensé à rien d’autre. Au cœur des conversations, il n’y avait que cela. J’acceptais de m’en détourner en façade. De feindre que je pouvais m’occuper d’autre chose. Mais au fond, c’était uniquement cela. Me retrouver un jour, peut-être sur mon lit, comme personne ne peut l’imaginer. La journée avait été longuement pluvieuse. J’avais adoré ne presque rien en faire, continuer à penser. Les bruits alentour ne me perturbaient pas. Puis, il y avait tout le reste. Cette part de la vie qui ne se partageait pas, d’entrer en découverte de soi-même pour n’avoir pas à tout dire, à cause des si nombreuses incohérences que j’observais. Il fallait en quelque sorte mieux mesurer et surtout ne pas se laisser emporter par la somme des désillusions, avec ce besoin constant de faire porter par les autres nos précieuses responsabilités. Toutes ces heures sauvées, désormais retranscrites. Et je me demande : « combien de jours », pour ces fragments, pour ce quotidien si différent de ce qu’il a été, lorsque je doutais encore, qu’il fallait que je m’acharne à devoir tout prévenir, au point de m’endetter envers tous, de me montrer à chaque étage, de ne plus faire que transmettre. Pendant ce temps-là, je m’abîmais, mes loisirs s’estropiaient, je ne faisais plus que dormir. Alors qu’il suffisait de se mettre avec le monde, comme il fonctionne, avec ceux qui ont besoin soit de fuir soit de combler. J’en étais, donc. Je fuyais ce qui m’enracinait à n’être que ce que je suis. Je comblais les effets négatifs dus aux multiples addictions. Puis, je voyais ces mots, dans l’après, survivre, comment survivre, moi, tellement aspiré vers ce que j’aurais pu devenir si je n’avais pas, un jour, décidé que je ne dépendrais pas de tout cela, à un très jeune âge certainement, mais c’est si difficile que la conscience le rappelle à toutes les étapes de la vie. Il faut alors se forcer à ne pas sombrer dans les méandres des allégeances. Il suffit d’un rendez-vous qui se répète, et c’est l’enchaînement. Plus rien d’autre. Chaque instant. L’entourage nous associe. Il est là. Dans cette case. Rassurant. Il n’en bougera plus. À moins que je résiste encore. Peut-être un jour, je serai arrivé. Mais ce n’est pas encore le bon lieu. Je le sais. Cela ne suffit pas. J’ai besoin de plus. J’aurais tant aimé commencer plus tôt encore, pour savoir ce qui s’était passé, mais il y avait trop de bruit, je ne supportais pas. Et on ne m’avait rien dit. Je ne pouvais pas savoir, que c’était ainsi qu’on progressait, pour ne pas oublier, pour aider la sensibilité à se construire à travers les événements quotidiens. Je le vois mieux maintenant, ce « fragment de jours », dans le calme réinstallé, il a fallu œuvrer, ranger, classer, jeter, puis lire à nouveau, replonger pour décider, s’aider, la veille d’un grand départ, je le savais, je n’aurais pas le temps, je ne pourrais pas tout emporter, il faudrait laisser, je ne comprendrais pas tout, puis il faudrait se laisser aller, ne plus rien modifier, de la trame, de l’intrigue, du mystère. Pour ce qui serait dit, il était temps. Pour ce qui ne se dira pas, il y aura les suivants. Chaque sujet. Chaque thème. Des lettres comme des territoires desquels il ne sert à rien de sortir si ce n’est pour apprendre d’autres langages. Je me suis longuement penché sur ce paradoxe. Tout ce qui nous est commun. Tout ce qui nous sépare. Et tout ce qui se disperse de nous autour de nous. Ce que nous recevons. Je m’étais dit : « Il suffira de ne pas finir ». Qui saura ? Je n’aurais peut-être fait que suspendre, étager, puisque tout se construisait autour, aussi. Il fallait faire avec. J’ai hâte de tout développer. Ce sera ce que j’avais espéré et j’y trouverai les pièges de la pensée, lorsqu’elle ne veut pas céder, qu’elle conduit à inventer d’heureuses légendes dont nous serions les héros. Ce jour, s’achevant. Le dernier. Sans nostalgie. Et sans surprise. La nuit. Le milieu de la nuit. Le besoin d’air frais. Je redeviens l’anonyme. Je tente d’établir ce qui pourrait se faire à partir de cela, mais c’est trop tôt. Je n’en sais rien. Peut-être rien. À part pour moi, une source que je suis seul à avoir trouvée. Quand on croirait qu’il n’y a que quelques secondes, d’une phrase à l’autre, alors qu’il y a parfois de longs mois, tout un passé à découvrir.

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Saturday, April 4, 2020

Chroniques de l'invisible - 090

Changer de lieu et d’habitudes. Changer d’horaires. Tout est changé. Le décor n’est plus le même. J’ai d’abord pensé plus inconfortable, mais en fait, non. Il fait juste adapter un peu. Tant pis, encore une fois, si les règles du temps sont transgressées. Ça aura mûri comme ça pouvait. Cette histoire de dates ne pouvait pas tenir longtemps non plus. Et puis, avec tout ce que je traîne, personne n’y aurait cru. Au fond, rompre le contrat d’exclusivité, en quelque sorte, remettre de l’égalité, c’était simple, ça refaisait tout circuler.

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Friday, April 3, 2020

Chroniques de l'invisible - 089

Même le café est encore chaud quand je redescends de là-haut. J’ai peut-être trouvé la bonne heure. Il y a encore les camions-poubelles qui font un boucan d’enfer. Maintenant, la matinée est bien rodée. Hop, hop, hop, hop, et il est déjà midi. Je file au boulot. Ylies, le prophète immortel, est arrivé hier. Lourd dossier : père soixante-quinze ans, mère trente-deux ans, un demi-frère de cinquante ans du côté du père, des demi-frères et sœurs du côté de la mère qui préfère vivre dans le quatre-vingt-quatorze comme il dit. En foyer depuis l’âge de quatre ans. Retard scolaire de deux années. Soupçon d’alcool et de prostitution. Tendances suicidaires. Il a onze ans. Il ne va pas toujours à l’école et quand je lui demande pourquoi, il me dit : « ça, c’est pas à moi de te le dire ». Je consulte son dossier. Fugue après maltraitance du père qui n’en veut plus. La mère non plus. Ylies rêve de devenir militaire. Il adore les chiens. Ça, ce n’est pas dans le dossier. Il voudrait essayer les armes. On se retrouve une première fois pour faire des additions et des soustractions, flegmatiquement. Les additions, OK. Les soustractions, bof. Je pense : « comment demander à un enfant dans cette situation de soustraire ». On laisse un peu tomber. Je ne suis pas son instituteur. Balade, dehors, temps sublime, retour. Longue discussion. Je rebondis sur ses questions, nombreuses. Il me parle spontanément de ses parents. Le lendemain, on se revoit. Il dormait. Il ne sait pas quoi faire. Il y a des tables de multiplication partout sur la table. On range tout. Je lui propose l’écriture. À partir d’un premier conte, qu’il me lit, puis à partir de l’une des photos accrochées sur ses murs. Je lui demande de choisir sa préférée. C’est au Maroc. Il est encore presque bébé, sur la plage, face à la mer, dans les bras d’un homme qu’il me dit être son oncle. Nous décrivons la photo. Quand il butte sur un mot et qu’il me demande, je lui donne l’orthographe. Sinon, je laisse filer les mots avec leurs « fautes ». La mer devient mère. Je lui demande d’inventer maintenant à partir de l’enfant, le Roi Ylies, et ce sont les rires, la folie d’écrire tout ce qu’il a le droit de faire et d’avoir, jusqu’à la vue imprenable sur la « mère ». Il veut recopier son texte au propre. Part chercher de nouvelles feuilles. Rapporte un feuillet complet de copies doubles. « Je vais écrire un roman ». Je l’écrirai pour toi. Il s’applique à tout recopier, se réjouit de montrer un texte parfait aux éducateurs, un texte qu’il a fait tout seul. Je le préviens qu’il reste quelques « fautes », qu’on peut les corriger s’il le veut, mais il ne veut pas. Ça lui convient comme ça. Il veut aller faire un babyfoot dans la cour. Il montre son texte à l’éducateur. Wilson. « C’est bien. Y’a encore quelques fautes ». Rien sur le Roi Ylies, rien sur le fait qu’il conduise sans permis, qu’il ait un zoo, un babyfoot, deux chiens et une vue imprenable sur la mer. Alors, Ylies est déçu. Alors, il ne jouera qu’avec moi, au babyfoot, puis au foot. Ce sera long mais au bout d’un certain temps, il intègre le groupe, joue avec ses copains. Douche, télé, repas. Il me demande si je serai là demain, continue à venir me voir, me poser des questions. Puis, il est autorisé à appeler son père, qui ne répond pas. Je serai là demain.

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Thursday, April 2, 2020

Chroniques de l'invisible - 088

Même effet du temps qui se ressent. Effet lune en cancer. Je pensais : « De toute façon, ce n’est pas vous qui déciderez ». Hier, c’était une suite de révélations mais les émotions sont restées contenues. Je dirais : « C’est facile de là où tu es de n’avoir que peur de tout et de te révolter contre le monde entier si le résultat est que tu restes toute la journée devant la télé en attendant qu’on te serve la soupe comme si on te devait toujours ce service ». Je ne vais pas changer l’ordre sous prétexte qu’il y aurait tout à coup une notion de devoir. Et je suis bien heureux. Que ce soit cela qui vienne s’inscrire. Le décalage immédiat. En marge à nouveau de toutes les majorités. Je ne suis pas surpris que l’inquiétude qui gagnait était peut-être fondée mais disproportionnée. J’avais besoin de cela pour le concrétiser et cette fois, le formuler. Les nœuds dans la tête qu’on empêche de délier. Que notre société empêche de délier. Au niveau le plus fragile où se trouve au contraire une force exceptionnelle.

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Wednesday, April 1, 2020

Chroniques de l'invisible - 087

L’effet calendaire. Je pense au premier du mois d’avant, du mois suivant, à tous les avrils de ma vie ou plutôt au fait que ce mois se soit inscrit un jour. J’ai eu un premier recul avec certains mots déposés. Tout est premier. Cela m’est souvent arrivé de jeter ou d’arrêter, mais le recul, c’est nouveau. Ce qui était dedans a été transvasé. C’est fait. Cela évoque pour moi ce permanent effort à l’œuvre. Il fallait ça pour en être là. Des milliers de pages. Non, des centaines de pages et des milliers de mots, en continu, suivant les mouvements de l’émotion. Ce qui manquait, c’est de n’avoir jamais été confronté à cela de cette manière. C’est moi qui imposais la méthode. Là, la méthode s’impose.

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