Je sais que c’est étrange de se dire que cela se passe au-delà des phrases. On aimerait tout ici du début à la fin avec au centre ou pas loin du centre une énigme inextricable et à la fin sa résolution. C’est pourtant bien exactement ce qui se passe, sauf qu’il n’y a pas de noms pour les personnages et donc aucune forme d’existence les concernant, ni ville où ils auraient vécu, ni famille d’origine. En tout cas, tout cela n’est ni sous-entendu ni clairement décrit, ou si peu qu’il faut un expert pour d’abord trouver puis comprendre. L’expert est utile si l’on veut décortiquer le texte, faire une autopsie en nous disant point par point ce que tel mot signifie vraiment et ce à quoi se rapporte tel autre mot et pourquoi quand il revient sous une autre forme cela rappelle que l’auteur n’est toujours pas mort – c’est impossible ! – et qu’il agit encore chaque fois que quelqu’un lit ou qu’il y fait référence. Alors, sans doute qu’il y a de cela qui se profile, savoir mieux où tout cela me mène ou plutôt jusqu’à quelle puissance je peux aller éveillé écrivant lorsque je baigne dans la preuve que ce moyen existe. Je ne dois pas m’attendre aux mêmes effets. Du point de vue de la temporalité, ce sera différent également. Une permanence de micro-événements. Commencer par « bien sûr, c’est cela qu’il faut faire », puis épuiser, puis laisser faire, laisser venir l’occasion rêvée, ce dont je ne me lasse pas, de tout à coup ne plus faire partie de ce lieu où routines et habitudes avaient fini par m’enfermer. On aimait pouvoir dire où chacun d’entre nous étions. Voilà qui rassure profondément. De même et ne faisant naturellement pas exception, j’étais là, simplement là. Maintenant, c’est fini. Personne ne sait où je suis et j’aime cette sensation, car c’en est une, nouvelle, tendue de quelques réflexes tâchant de plaire ou de distraire, n’oubliant pas, d’une certaine manière, comment tout cela a commencé, globalement, oui, il suffirait de dire « cette année », si on arrive à le savoir, cela aurait pris un an, si on veut, puisqu’il faut un format, sauf que dans la réalité, ce n’est pas tout à fait pareil, cela vient de plus loin, de bien plus loin et il n’y a qu’un seul moyen de l’enrichir (en tout cas, c’est ce moyen qui m’occupe actuellement) : écrire à l’infini. Offrir à tout cela une existence physique à travers l’image acceptable d’un corps textuel.
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