Friday, March 30, 2018

[NO WAY] - 37

Rester sur place et traverser de multiples univers, comme des sensations, un nécessaire retour aux origines, d’un sentiment, très puissant, qui s’est développé à un moment comme celui-ci, dans l’isolement total, à ne plus vouloir voir comment devraient se déchiffrer les signes de l’impulsion, ce désir si communicatif de mettre en communauté l’exclusion. Ce n’était pas tant l’idée de s’en détacher qui s’exprimait, mais le besoin de reconstruire une conquête de soi, impossible à concevoir parmi ces renvois de l’urgence de ne pas être présents dans le monde autrement que par l’activité d’un autre. Ce sont encore des évolutions qui se comptent en années. Comme une nécessité de format. La pensée serait lente à modeler son espace, mais elle persiste à vouloir agir par fulgurances. Un constant effort pour la saisir, à tout moment, pour en réemployer l’énergie, comme hésitante, des phrases qui se métamorphosent, en seulement quelques minutes, pour rester dans une zone réduite au silence, ou plutôt, une fois exprimée, mourant, s’absentant, de n’avoir eu besoin que d’un court instant, cela même que serait son intime expression, avec, comme perdu, un regard s’immergeant dans ce qui ne serait utile à rien ni personne, souhaitant qu’il aurait dû y avoir une explication, dans l’ordre chronologique qui peut-être s’est inversé pour ne pas se laisser prendre au jeu de la simplicité, comme dans l’inespéré, l’idéal se manifestant, laissant libre le champ à l’aventure permanente.

Monday, March 26, 2018

[NO WAY] - 56

Reprendre le même format pour créer. Ce qui se dit dans ces moments-là, d’inutile. Parce que le monde s’ouvre. Sur une dimension presque ésotérique. Qu’on n’aurait pas imaginée seulement quelques heures plus tôt. À cause de l’absence. Se retrouver à vouloir être dans l’indéfinition du discours. Projet fou. D’un camaïeu de fictions. De la plus établie à la plus conceptuelle, du « je » au « nous », du réel au virtuel. Comme serait pensée l’émotion. Presque à son état le plus pur. Sans les pervers. Mais avec leurs perversions. Qui ne s’échappent pas. Qui sont inscrites dans le quotidien. En marchant. Soleil radieux illuminant le passé. D’un coup d’œil. Espérer. Mieux : croire. Qu’il serait un moyen de survie suffisant. Peut-être pour un an. Peut-être pour dix ans. Encore. Des durées impensables. En décalé. Par rapport à l’histoire réelle. Revenir non pour dire, parce que c’est acté, désormais, c’est dit, la parole s’est réanimée. L’année de l’explosion. Du grand cauchemar. Qu’il a fallu réaliser, avec des moyens brutalement fauchés. Il y a un an. Il y a dix ans. Le retour de toutes les formes du traumatisme. Comme une maladie incurable.

Tuesday, March 20, 2018

[NO WAY] - 47

Grands moments de vide pendant lesquels j’ai besoin soit de me relire indéfiniment soit de ne rien faire, indéfiniment. Des jours où je relègue comme au dernier moment toutes les tâches ingrates, comme pour libérer du temps en amont, qui ne sert qu’à observer, qu’à sentir, ce qui se passe tout autour, dans l’ancien, ce qu’il y a de différent, à tout avoir, partout, disponible, comme ce que pourrait être, justement, une vision de l’achevé, pensant à cette nécessité que j’ai eue de ne plus vouloir exister, comme disparaître, donc, à la vue du pervers, lisant ses mots dans mes mots, son empreinte, sa manière d’être arrogant vis à vis de l’esprit, qui s’est inscrit, pour se rappeler à l’ordre, quand le soigné viendra à nouveau aider celui qui n’attendait rien, finalement, se produisant dans l’inconnu, à quelques jours d’une nouvelle ouverture, voir ce qui a produit, toute l’année, parce que c’était l’objectif espéré, et parce qu’il s’est en partie réalisé, comme la fabrique d’une nouvelle histoire, là, sous mes yeux, impressionnant, le format d’une durée qu’on ne pourrait pas concevoir, un temps politique.

Friday, March 16, 2018

[NO WAY] - 12

Passer un jour dans un endroit où une vie s’est inscrite durant des dizaines d’années et laisser la mémoire agir. Assumer. Ne pas reporter. Retrouver un raccourci. Partir. Vite partir. Parce qu’un jour une autre vie s’est montrée. C’était le cumul de plusieurs hasards. L’un était né par hasard. Il avait eu ces parents-là comme il aurait pu en avoir d’autres, ailleurs. L’autre était aussi né par hasard, mais à un autre moment, dans une autre ville. Il avait eu d’autres parents. C’était le cas de tous. Et ce jour-là, quelque chose qui d’abord les avait séparés toute une première partie de vie les réunissait. Quelque chose s’est rencontré. Un hasard. Il a adoré ce moment, mal aimé un autre. Ils se sont liés, mais il a fallu partir. Fuir. Parce que c’était la mort qui tendait les bras. Il n’y avait plus que le café qui circulait dans son corps, jour et nuit. Un autre, encore un autre, était passé par hasard. D’abord parler, puis pleurer, pour la première fois. Poser sa tête contre une épaule attentive. C’est impossible de tout comprendre en une fois. Il faut du temps. Peut-être dix ans. Il lui a donné une clé. C’était la clé de chez lui. Si tu as besoin de prendre un peu recul, viens passer une semaine à la maison. Tu y viens quand tu veux. Quand il voulait... Le jour-même, le lendemain. Il y était allé passer quelques heures, respirer la fraîcheur. Il savait qu’il ne trouverait personne. Il allait juste prendre un peu de recul. Il y avait là un parfum qu’il ne respirait plus depuis de nombreuses années. C’était une partie de lui qu’il avait abandonnée. Parce qu’il n’y croyait plus. Que la vie pouvait à nouveau sentir bon. Il avait signifié sa venue en déposant une petite fleur blanche et un simple Merci. Se retourner. Partir. Franchir une nouvelle porte. Un escalier à descendre. Des boîtes aux lettres à observer, longuement. Une autre porte. La rue. Le cumul de toutes les autres vies. La nécessité d’un retour. C’était encore trop tôt. Il fallait laisser mûrir le projet.

Monday, March 12, 2018

[NO WAY] - 44

Il faudrait, maintenant, réagir, car le corps se dégrade. Ce n’est pas comme d’habitude. C’est dans la tête. La tête n’en peut plus. Elle voudrait exploser. Salive constante, répugnante, comme du fer. À toujours vouloir s’allonger. Pour dormir. Quand nous pourrions ne jamais avoir eu envie. De résoudre. Cette énigme-là. Comme s’il était nécessaire de traduire. Ce que serait l’angoisse. Partout. Inespérée. Propulsant. L’impensable. Au cœur de l’inédit. Pour ne plus rien sentir. S'anesthésier. C’est possible. Nous l’avons déjà fait. Sous la douleur. Ne plus rien sentir. Bouts de phrases éparpillés.

Tuesday, March 6, 2018

[NO WAY] - 11

Il y a ce doute sur la permanence. Un « pourquoi continuer » qui s’impose, comme s’il y avait tout à coup des milliards de choses à faire de plus importantes, comme aller voir un coucher de soleil, stupidement récurrent chaque soir. Ce serait croire encore, pour s’en sortir, des méandres, parce qu’ils ne se tarissent pas, eux, ils subsistent, ils changent même de forme à chaque instant, entre ce qui s’écrit lentement, comme se réalisant en substance, mais ne se voit pas encore, provoquant l’effroi, ce qui a été déposé quelque part et qui doit se retraverser en profondeur alors que ce qui a été justement écrit a fait de moi un autre auteur, un auteur qui se lit quand il était l’auteur jugé immature. À pleurer. Indigeste. Mais c’est pourtant sur ce qui existe qu’il faut aussi travailler, comme assumer, ce qu’on a été, un été, semblant se laisser envahir par l’écriture continue, si longue, si fatigante, pour seulement quelques pages, parce qu’il semblait que la qualité serait meilleure, seulement pour soi, en lecteur, celui qui écrivait ce jour-là, avec une nouvelle obligation, de s’y tenir, d’aller au bout d’un premier bout, aller pour voir, de l’autre côté, de ce qui se dit, de ce qui ne se dit pas, testant, emportant, pour ne pas pleurer réellement, s’éviter la honte de l’abandon, pour soi, quand plus rien ne parle autour, quand les paysages sont fanés.

Sunday, March 4, 2018

Anne de Staël

La calligraphie
Du premier croissant de lune
De la lunule
A besoin d’autant d’obscurité
Pour aller au plein du jour délié

Friday, March 2, 2018

[NO WAY] - 38

Parce qu’une main, une main devenue anonyme, caressante, une main appartenant à une partie du désir, une partie seulement, la même qui aurait activé un rêve, provoquant des images insensées, un corps qui jamais n’aurait dû être désiré, l’interdit, l’infidèle, comme une fulgurance, dos courbé, une bouche s’immisçant, pensant qu’il est désormais trop tard pour renoncer, à cause du respect, à cause du plaisir, tous les deux, réels, souhaitant qu’aucune donnée ne soit enregistrée, frontière de l’intime, définitivement franchie, don de soi pour l’impensable, dans le tumulte d’horizons à jamais noircis, ne voulant pas céder, se sentant piégé, à cause d’une seule seconde d’égarement, un instant de vie, regretté, quand il aurait fallu estimer que l’atmosphère était trop chargée du désir de l’autre, impossible à envisager une minute plus tôt, tout à coup, emporté, dans l’effondrement, comme un pacte signé, trop tard, trop loin, trop faible, le triptyque infernal de l’acte poétique, face à la désolation du discours, ne pouvant plus rien faire qu’aller au-delà de l’insensible, oui, oui, oui, pour combien de refus, avant, avant la soumission, avant que le corps s’allonge, avant que les vêtements se dégrafent, avant que la main tente tout, que la bouche transgresse, avant que le cauchemar commence.